Moi je vais revenir.
Plongée 16. Site : Richelieu Rock
C’est une plongée qu’un débutant ne peut pas apprécier, en fait. Il n’y a aucune difficulté technique mais il va tout le temps penser à son air, à réussir à s’équilibrer, à ne pas perdre le guide de vue. Et il va rater 50% de la plongée.

Moi je ne pense à rien. Tout est automatique et comme je suis un petit gabarit je ne consomme rien. Tous les autres remontent toujours avec moins d’air que moi. Sauf cas particulier (voir Un instant de panique).
Alors je profite à 100% de ce qui se passe. Les yeux regardent et le reste est géré sans que mon cerveau ne demande rien.
On commence comme ce matin. Mais il n’y a pratiquement plus de courant. Je n’accroche même pas la longe, je purge, je me retourne et je glisse directement à 20m, tête en avant.
Je n’avais pas bien vu ce matin, effaré par les premières évidences : le nombre inimaginable de poissons, la masse et l’étendue du ban, les couleurs. J’étais saturé d’informations.
Cette fois je sais, alors je me concentre sur autre chose : la multitude. A bien y regarder je n’arrive pas à tout décrire. C’est impossible. Il y a trop de vies différentes. Des gros, des petits, des unis, des bicolores, des rayés à l’horizontale ou à la verticale, des points, des tâches, des zèbrures. En gris, en bleu, en jaune, en orange, argentés ou mat, longs ou courts, ventrus, lisses ou pleins de piquants. Solitaires, à deux, à dix ou par centaines de milliers.
Et parfois c’est un mélange : petit et ventru, avec des rayures et des points et tout ça en trois couleurs.
Et je ne parle que de la faune. Pour la flore c’est pareil. Du corail en tables, en piques, en boules, en branches. Jaune, vert, rouge, blanc (ça c’est mauvais signe mais il y en a peu). Des jardins, par mètres carrés, d’anémones roses ou vertes pâles, blanches.
Faits notables quand même : une murène jaune (ma première) et un tout petit poisson ballon, grand comme mon doigt, protégé entre deux branches de corail.

J’engrange des images par dizaines.
Comme ce matin, palier dans le bleu total, on ne voit même plus les bulles des autres plongeurs et on est trop loin du récif pour voir les poissons. Seuls dans la mer d’Adaman. Génial.

Pour certains c’est la fin du voyage. Cinq jours. On rentre au port pour en débarquer quelques uns et embarquer quelques autres.
Il me reste huit jours. Si tout se passe comme prévu je replongerai quatre fois ici.